A NEAT LAWN 1967

À l'instar du Bigger Splash peint la même année, A Neat Lawn joue du contraste de la géométrie et de l'aléatoire. Fn 1967, Hockney n'ignore rien des derniers développements de l'art d'avant-garde, de ce purisme formel vers lequel l'engagent les théories nouvelles du minimalisme. (Donald Judd publie son article sur les " objets spécifiques " en 1965.) Par sa symétrie, parla" grille " qui en ordonne les motifs, A Neat Lawn n'a presque rien à envier aux tableaux d'Ad Reinhardt ou à ceux de Brice Marden. Le " presque" s'incarne ici dans le jet perturbant d'un système automatique d'arrosage. L'étude de l'eau, de son mouvement, des irisations qu'elle provoque, ne cesse de retenir l'attention de Hockney. De ses différents états, comme Léonard de Vinci avant lui, il dresse un inventaire précis. Fn 1965, il peint Different Kinds ofwater Pouring into a Swimming Pool, Santa Monica [Divers types d'eau se déversant dans une piscine, Santa Monica]; deux ans plus tard, Four Different Kinds 0f Water recense les formes qu'elle adopte à la surface d'une piscine, ou à la sortie d'un tuyau. L'eau à laquelle il s'attache peut ressembler à un voile, comme dans les piscines; elle peut prendre la forme d'un jet, comme dans les peintures de douches ou dans celles des pelouses. Fn voile, elle est opaque ou transparente, en jet, linéaire ou brumeuse. Fntre voile et traits de gouttelettes, il y a celle de la douche de la Domestic Scene, Los Angeles de 1963. Rectiligne comme un rayon laser, il y a celle des peintures de 1964-1965, qui jaillit des pommeaux de douche. À l'état naturel, il y a celle qui, en 1972, tombe d'un nuage japonais sur la surface d'une toile. Dans les trois peintures de pelouse de 1967 (A Lawn Being Sprinkled [Une pelouse qu'on arrose], A Lawn Sprinkler [Arroseur de pelouse], A Neat Lawn), elle se répand à la surface de la toile comme un voile de brouillard. Touant des effets de transparence, l'eau rejoint le verre, les rideaux de douche ou de scène, les voiles dans lesquels llockney ne cesse de voir autant de métaphores de la peinture elle-même, autant de réponses aux dogmes modernistes de " l'opacité".

D.O (David Hockney : espace/paysage, centre Georges Pompidou )